Le vendeur d’un véhicule automobile, comme tout vendeur de manière générale, est tenu de garantir les vices cachés de la chose vendue, en application des articles 1641 et suivants du code civil. Précisons toutefois que le vendeur, s’il n’est pas un professionnel, peut écarter cette garantie par une clause spécifique insérée dans le contrat de vente. Le vice caché se définit comme le défaut de la chose vendue, qui existait avant la vente, qui n’était pas apparent, et qui rend la chose impropre à son usage (sa destination) ou qui en diminue tellement l’usage, que l’acheteur ne l’aurait pas achetée ou à un prix inférieur. Ces conditions sont cumulatives. L’acheteur mécontent qui envisage de solliciter la résolution (l’annulation en termes profanes) ou la réduction du prix (il faut faire un choix entre ces deux options, l’action rédhibitoire et l’action estimatoire ne pouvant se cumuler) doit s’inquiéter de la démonstration du vice avant d’engager l’une ou l’autre des actions. Il est fréquent que l’acheteur malheureux sollicite sa compagnie d’assurance, laquelle mandate un expert (non judiciaire) qui organise une expertise amiable contradictoire. La qualité et la précision des investigations de l’expert d’assurance sont décisives pour le succès de l’action de l’acheteur, surtout lorsque l’expertise amiable n’est pas suivie par une expertise judiciaire, certes longue et coûteuse, mais qui est en général approfondie.
Un arrêt récent de la Cour d’appel de PARIS[1] illustre parfaitement cette problématique. Dans cette affaire, un couple a fait l’acquisition d’un véhicule d’occasion auprès d’un garagiste et vendeur de véhicules d’occasion. Le véhicule était ancien (il avait été mis en circulation 8 ans et demi avant la vente) et kilométré (112 000 kms). Quelques semaines après l’achat, les acheteurs confiaient leur véhicule à un garage pour changer des fusibles, le démarreur et procéder à divers contrôles de fonctionnement des calculateurs et du câblage. Quelques temps après cette première intervention, une perte anormale de puissance du véhicule rendait nécessaires d’autres contrôles. Face à ces incidents à répétition, les acheteurs demandaient à leur assureur d’organiser une expertise. L’expert concluait que :
« Les investigations techniques et les contrôles effectués ont permis d’établir que le véhicule est entaché d’un dysfonctionnement antérieur à l’achat. La responsabilité du garage est engagée sur le fondement de la garantie légale des vices cachés. »
Problème : les investigations de l’expert se sont révélées très limitées. Il a passé le véhicule sur le banc de diagnostic, lequel a indiqué que l’origine des désordres était imputable à un dysfonctionnement de la boîte de vitesses. Aucune investigation supplémentaire n’a été menée ; La boîte de vitesse elle-même n’a pas été démontée. L’expert s’est ainsi convaincu de l’existence d’un vice caché au seul motif qu’une vidange de la boîte de vitesses a été réalisée 6 ans après la mise en circulation du véhicule, alors que le plan d’entretien du constructeur ne prévoit pas une telle vidange. L’expert d’assurance s’est ainsi contenté de simples indices pour se prononcer. Il n’était donc pas établi que cette vidange avait un lien avec le dysfonctionnement ultérieur de la boîte de vitesses, ni qu’elle avait eu pour cause un défaut de la boîte elle-même. L’expert ne pouvait affirmer, sans plus d’investigations, l’existence d’un vice caché antérieur à la vente. C’est précisément ce qu’a estimé la Cour d’appel de PARIS qui a purement et simplement débouté les acquéreurs de leurs demandes et les a condamnés à verser au vendeur une indemnité au titre des frais engagés par ce dernier pour se défendre. Moralité, les expertises amiables sont à exploiter avec prudence !